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Chatouillement De L'Âme
7 mai 2013

Un film, un regard, Hannah Arendt...

HA_Plakat

Après avoir mis à l’honneur Rosa Luxemburg et Hildegard von Bingen, c’est à un autre grand personnage féminin que s’attaque la réalisatrice Margarethe von Trotta avec son actrice fétiche Barbara Sukowa,  la philosophe juive allemande Hannah Arendt (1906-1975).

La réalisatrice a voulu approfondir la réflexion de l'une des plus grandes femmes intellectuelles du XX siècle, en se concentrant sur les années 1960-1964, l'époque où Hannah Arendt  va assister au procès Eichmann, comme correspondante du New Yorker et déclencher par son compte rendu une controverse internationale. Il ne s'agit donc pas d'un biopic mais d'un épisode emblématique pour illustrer sa pensée. Hannah Arendt avait engagé une réflexion sur le national-socialisme, sur un plan relativement abstrait , dans son livre Les Origines du totalitarisme, paru en 1950. En assistant au procès d'Eichmann, elle va pouvoir démontrer sa théorie sur la banalité du mal, en s'appuyant sur une personne "vivante", incarnée par Eichmann.  Quand tout le monde voulait voir en Eichmann une figure démoniaque, elle considère le haut fonctionnaire nazi comme un personnage falot, désespérément normal, une sorte de "fantôme", animé d'une insoutenable "banalité du mal". Ce que suggère Arendt, c'est que le Nazi tel que nous l'imaginons n'existe pas et qu'au contraire, toutes les nations, toutes les collectivités humaines et chacun de nous, dans certaines circonstances, surtout si nous cessons de penser et de diriger notre volonté par la pensée pourraient basculer dans le mal extrême.

Hannah Arendt propose le concept polémique de "banalité du mal" qui prend sa source dans l'absence de pensée de l'homme. Incapacité à voir les choses d'un point de vue autre que le sien, incapacité à s'exprimer autrement que par clichés, incapacité à distinguer le bien et le mal, ainsi définit-elle le vide terrifiant de ce concept. Penser est faire l'expérience d'un retrait, qui nous préserve du mal, dit Arendt, qu'à la condition de ne pas nous isoler totalement, mais de conserver la pluralité inhérente au monde, où l'homme est toujours un parmi d'autres. En écho à l'altérité, l'empathie et l'éthique de la responsabilité ...

J'ai beaucoup aimé ce film. Le personnage d'Hannah Arendt très bien interprété par Barbara Sukowa, m'a touché. Elle ne vacillera pas devant les menaces et l'adversité, y compris de ses plus proches amis. Elle soutiendra sa théorie, faisant front à la violence avec laquelle la communauté juive aux Etats-Unis et en Israél a réagit, certains souhaitant  sa mort. Hannah Arendt construit une pensée  non dogmatique, heuristique, remettant sans cesse au travail ses intuitions, ses idées.

Hannah Arendt est un film-hommage qui prend résolument parti pour son héroïne. Par petites touches, Margarethe Von Trotta dresse un portrait de la femme, à travers sa vie quotidienne, son travail d’enseignante à l’université, ses relations amicales et amoureuses.

Mais elle ne perd jamais de vue le travail de la philosophe et le cheminement de sa pensée, qui s’élabore par étapes dans le film et s’affirmera avec force dans la scène finale.  

Pour vous donner le goût d'y aller...

Bon film , LN
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