Bascule un soir d’ Oh -rage
Premier fragment
Ce n'est pas un roman : ce que je
raconte est ordinaire. Je suis un type ordinaire, un bon peintre en lettres. Je
savais faire de belles lettres, de toutes les formes, sur toutes les surfaces,
de toutes les couleurs, d’alphabets d’ici et d’ailleurs.
En réponse à votre lettre si
aimable, aux tournures élégantes voici à votre demande quelques strophes de ma
vie. Pour mieux me connaître, dites-vous. Vous prenez le risque de basculer
dans un monde torturé et de renoncer à votre vocation de me relier au monde des
vivants, ceux du dehors, là où le ciel enveloppe chaque âme. Ici la voûte
céleste n'est que moisissures, griffures, mots désespérés, pierre irrégulière
que je contemple dans les moindres interstices pour me plonger dans des
paysages seuls de moi connus et dons je fais mon territoire .Mais voyons les
interstices de ma jeune existence. Comment m'imaginiez-vous. Un quinquagénaire
ou au moins la trentaine. Eh bien je suis un senior comme ils disent. 62 ans depuis 2 mois et treize jours. Je
compte chaque jour qui passe maudissant le monde de ne point faire passer le
temps plus vite ou qu’il me rattrape. A vous écrire je peux dérouler le
parchemin raturé, biffé mais néanmoins lisible d'une existence paisible
ordinaire jusqu'à cette nuit d'orage……..
Qui suis-je ? Parfois je me
le demande, je ne sais plus très bien. Un visage polymorphe, un corps aux
multiples empreintes, un roc érodé, de pics, de failles et de gouffres.
Je ne sais plus très bien où ma vie a commencé. J'ai perdu les seuls objets qui
auraient pu fixer des instants, des visages. Ils m'ont tout pris, ils m’ont
bafoué, enfermés, punis et mes lettres
dessinées sont la seule mémoire des traces que j'ai laissé.
A suivre.....
LN