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Chatouillement De L'Âme
16 janvier 2013

Au fil d'une oeuvre, Edward Hooper...

 

HOOPER a cotéLa rétrospective, au Grand Palais, des oeuvres du peintre américain Edward Hopper (1882-1967),  est une très belle exposition, qui dévoile la diversité d'oeuvres moins connues, aquarelles, gravures, illustrations.

 J'ai attrapé au vol les dernières places, remises en jeu sur le web. Les grandes expositions parisiennes sont devenues si attractives, si "foulesques"  que j'ai développé une agilité et une allure stratégique pour pouvoir, malgré la foule, contempler l'oeuvre exposée. M'y fondre, cela devient impossible par le bruit, le son déformé des audio guides, l'agglomérat des spectateurs statufiés, pendus aux lèvres du conférencier qui émet un son inaudible pour les électrons libres, comme moi. Au musée le savoir ne se partage pas, il se paye ou s'en-vole.

Rusée comme une grenouille, je pénètre dans la première salle où la biographie du peintre couvre le mur. Je prends les tableaux à contre-courant, mon parcours est aléatoire, contournant les grappes de gens, agglutinés. 

 

 Ce qui me fascine chez Hopper, c'est qu'il part du réel pour mieux le dépasser. Il confère au réel un effet d'imaginaire. Les détails sont réalistes, mais l'ensemble ne l'est pas. Le peintre représente une ambiance qui apparaît typiquement américaine mais qui se révèle universelle dans les aspects de la vie moderne et de ses ruptures. Il pose sur le monde un regard aigu en peignant le tragique du quotidien, met à nu le grotesque de la condition humaine. Il dénonce  l'uniformisation de la société Américaine  des années 20,   l'aliénation de l'homme sous l'effet du divertissement généralisé, la banalisation de la consommation effrénée, l'étourdissement de l'individu, toujours en tension dans un monde suspendu, celui de l'attente. Les personnages sont seuls, même en présence de l'autre. Leurs regards se perdent dans le lointain, se croisent  sans se rencontrer. J'entends ce commentaire: " Il n'y a aucune connexion entre les gens. Chacun est entouré de vide". Les décors  se ressemblent: chambres d'hôtels, bureaux, maisons. Les intérieurs sont dénués d'âme, ternes.

 

Son regard porté sur les paysages nous amène à l'expérience de la frontière, la rencontre de l'homme et de la nature à la limite de la civilisation.    

hooper 8Lighthouse Hill - 1927

 "Le mythe du parcours sans entraves de l'espace libre de la nature se mue en raidissement et perte de l'orientation ou est traversé par un symbole de la civilisation, passage à niveaux, rues, station essence..." (Hopper, éditions Taschen, Rolf G.Renner).

essence

Gas- 1940

 Hopper écrit "[...]Mon but en peignant est toujours d'utiliser la nature comme un intermédiaire, de m'efforcer de capter sur la toile mes réactions les plus intimes face à l'objet tel qu'il apparaît quand je l'aime au plus fort. [...] Dans l'évolution de chaque artiste on retrouve toujours le plan de l'oeuvre tardif, dès ses débuts. Le noyau autour duquel  l'artiste bâtit son oeuvre, c'est lui même; c'est le moi central, la personnalité, peu importe comment on la désigne et elle se modifie peu de la naissance à la mort. Ce que l'artiste a été il l'est toujours avec de légères modifications."

Deux gravures magnifiques d'Hopper, inondées de lumière, par le travail de l'intensité et de l'orientation du trait.

 

Night-Shadows-1921_exact780x585_l

Night Shadows 1921

 

the-cat-boatThe cat boat - 1922

Dernière toileSun in an empty room - 1963

Et pour conclure, en hommage aux artistes, une phrase d'Augusto Boal (1931-2009), brésilien, écrivain, metteur en scène, fondateur du Théatre de l'opprimé :

" L'artiste est celui qui voit ce qui saute aux yeux et que les autres ne voient pas."

Si vous aimez Hopper, et surtout pour ceux qui ont manqué ce rendez-vous,  je vous conseille le petit catalogue de l'exposition, format italien, très  bien composé.

 Bonne visite

LN
 

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